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IV. L'enjeu économique des éoliennes
Les énergies renouvelables sont celles fournies par la nature et qui ne s'épuisent pas tant que l'on ne les utilise pas plus vite qu'elles ne peuvent se renouveler.
a) Une énergie en pleine expansion
Une des éoliennes les plus utilisées aujourd'hui est l'éolienne de 600 kW avec une tour de 40 à 50 m, et un diamètre de rotor de 43m. Pour les éoliennes de ce calibre, il y a beaucoup d'offres et beaucoup de concurrence, et une telle éolienne coûte de 400 à 500.000 Euros environ.
Le prix de l'éolienne représente en général environ 75% de l'investissement total, qui est de l'ordre de 500-800 Euro/kW installé
Les coûts d'installation comprennent de nombreux aspects, directement et indirectement liés:
- Il faut d'importantes fondations pour soutenir une éolienne. Ces fondations sont le plus souvent en béton armé. Les fondations peuvent coûter environ 5% de l'investissement total.
- Une voie d'accès que les poids lourds et les grues peuvent emprunter doit être aménagée, ceci revient aussi cher.
- Il faut connecter l'éolienne au réseau haute-tension de EDF. La connection seule peut représenter 5 à 8% de l'investissement total.
- Un transformateur est nécessaire afin de convertir l'électricié produite pour l'envoyer vers le réseau.
- Une liaison téléphonique est aussi importante afin de pouvoir surveiller l'éolienne à distance.
De nos jours, une éolienne est conçue pour durer environ 20 ans et fonctionner environ 120.000 heures (soit 6.000 heures par an). En comparaison la durée de vie d'une voiture est de 4 à 6.000 heures.
Les coûts annuels d'exploitation et d'entretien d'une éolienne moderne de nos jours est d'environ 1,5 à 2 % de l'investissement initial. Ils peuvent être de l'ordre de 20 Euros/kW installé.
On peut aussi calculer ces coûts en fonction de la production. Ceci prend on compte l'usure et la fatigue de l'éolienne (plus elle produit, plus elle s'use). Dans ce cas le montant est d'environ 1c d'euro le kWh.
Lors de nos recherches, nous avons remarquer que le thèrme "bilan énergétique" revenait souvent. Appelé "analyse de cycle de vie", il prend en compte non seulement l'énergie qui a été utilisée pour fabriquer l'éolienne, mais aussi pour le transport, l'installation, la maintenance et destruction. Si cette énergie est supérieure à l'énergie produite au cours de la vie de l'éolienne, le bilan énergétique est négatif, et donc non rentable, ni écologique.
La restitution de cette énergie dépensée au cours de la vie d'une éolienne est récupérée par une éolienne moderne en 2 à 3 mois. Or la durée de vie moyenne d'une éolienne est de 20 ans environ. Le bilan énergétique d'une éolienne est donc très positif.
Pour finir, et outre les nombreux avantages qu'elle partage avec les autres sources renouvelables d'énergie, l'exploitation de l'énergie du vent présente une série d'avantages propres:
L'énergie éolienne est modulable et peut être parfaitement adaptée au capital disponible ainsi qu'aux besoins en énergie. Il n'y a donc pas d'investissements superflus. Cette modularité permet aussi de maintenir en fonctionnement la plus grande partie de l'installation lorsqu'une pièce est défectueuse.
Les frais de fonctionnement sont assez limités étant donné le haut niveau de fiabilité et la relative simplicité des technologies mises en oeuvre.
Le prix de revient d'une éolienne va probablement diminuer dans les années à venir suite aux économies d'échelle qui pourront être réalisées sur leur fabrication.
Techniquement au point, les éoliennes sont rentables dans les régions bien ventées.
La période de haute productivité, située souvent en hiver où les vents sont plus forts, correspond à la période de l'année où la demande d'énergie est la plus importante.
b) Face au nucléaire
Midi Libre: Les détracteurs de l'éolien mettent en exergue l'aspect très aléatoire du moyen de production et son coût prohibitif. Qu'en dites-vous?
Jean-Michel Germa:l'énergie éolienne fait partie des choix de société, avec son environnement et son économie. De grands pays industriels comme les Etats-unis, l'Allemagne ou l'Espagne ont fait le choix éolien, en lui donnant une place conséquente.
Entre 1995 et aujourd'hui, il s'est construit dans le monde 40 000 MW de puissance éolienne, avec 140 000 emplois à la clé. Tout cela correspond à la consommation de 30 millions de ménages européens. Dans le même temps, il n'y a eu que 1 500 MW supplémentaires en nucléaire, avec pas mal de pertes d'emplois.
De son côté, la France continue à faire croire que l'éolien est cher. Et les gens qui s'opposent à ce moyen de production oublient que le facteur d'intermittence est hautement prévisible.
Il faut savoir que plus une énergie est décentralisée, plus elle crée d'emplois. L'éolien crée cinq fois plus d'emplois par kilowattheure que le nucléaire. En France, l'installation de 1 500 MW a généré 1 500 emplois dont un tiers dans la région.
Comment expliquez-vous le retard français?
Il y a la France d'en haut et celle d'en bas. Cette dernière comprend notamment les élus locaux dont je me loue de l'intégrité. Contrairement à ce que l'on peut entendre de la part des anti éolien, les élus ruraux ne sont pas circonvenus! Ils veulent voir ce qu'on leur propose. Et nous disent qu'ils n'ont pas vu l'ombre d'un investissement depuis l'exode rural. La perspective d'un développement industriel, raisonné et local ne les laisse pas insensibles. De surcroît, 80 % des enquêtes publiques sont favorables.
Dans les ministères, sur les bancs de l'Assemblée nationale et du Sénat, on trouve la France d'en haut. Celle des gens qui ne jurent que par un système d'énergie centralisée et défendent le corporatisme des acteurs du nucléaire. Ces derniers (EDF, Areva, le CEA, la Cogema) défendent leurs intérêts. C'est de bonne guerre! Nous sommes effectivement dans une bataille commerciale. On souhaiterait pouvoir s'exprimer à armes égales avec les autres formes d'énergie.
D'aucuns reprochent un développement anarchique de l'éolien. Votre avis?
C'est inacceptable d'entendre cela. Nous travaillons dans un cadre légal et juridique très strict. On ne peut transgresser le choix des élus. Pas plus que l'on peut soudoyer les maires puisque c'est le préfet qui délivre le permis de construire. L'enquête publique est de rigueur et il faut satisfaire au code de l'urbanisme. Vous savez, c'est aujourd'hui plus facile de construire un supermarché que trois éoliennes!
Néanmoins, il arrive fréquemment que les préfets ne jouent pas le jeu et n'appliquent pas la loi. En 2003, 90 % des permis de construire ont été refusés. Il faut quelquefois les redéposer deux ou trois fois. Cela se termine parfois au tribunal administratif et l'on observe qu'il se crée de la jurisprudence en faveur de l'industrie éolienne. A la "Compagnie de vent", on a des centaines de mégawatts en souffrance depuis deux ou trois ans.
En outre, on assiste à des épisodes un peu curieux. Ainsi, une polémique s'est fait jour après la chute d'éoliennes dans le nord. Le Préfet a-t-il pensé au principe de précaution à mettre en place face au risque terroriste et à une attaque aérienne sur une centrale nucléaire?
Tout cela compromet-il l'avenir de la filière?
Si la France n'a pas d'industrie éolienne, c'est parce qu'elle n'en a pas voulu. En 1998, la Compagnie du vent employait 5 personnes à Montpellier. Depuis, nous avons créé 50 emplois ici et 10 au Maroc. C'est respectable de créer des emplois. Sérieusement, si la France prend acte des besoins pour créer une industrie, elle sait ce qu'il faut faire.
Recueilli par Anthony JONES LE MIDI LIBRE 11/05/04
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